Chapitre 2

Villes et campagnes

Introduction

I) L'organisation des campagnes

II) Les Villes anglaises pendant l'ère élizabethaine

Conclusion

Introduction

Après avoir vu les structures politiques et les dirigeants, il faut s'intéresser aux structures socio-économiques et à la vie des sujets. L'Angleterre, comme l'Europe médiévale en général, était principalement rurale au XVIème siècle. Cependant certaines grandes villes comme Londres ou Cambridge se distinguaient dans le paysage.

I) L'organisation des campagnes

Du fait de leur importance, ce premier point sera consacré au portrait social et spatial des campagnes anglaises. Deux types d'espaces ruraux existaient en Angleterre: les downlands ou basses terres au Sud-Est, agricoles, et les uplands, moins fertiles et plutôt réservées à l'élevage. Les populations s'y organisaient en villages de tailles diverses dotés d'institutions précaires de justice et principalement sous la domination des seigneurs des manoirs.

 Organisation d'un village typique du Bassin Londonnien au XVIème siècle

Bien que ce modèle soit assez général, une originalité typiquement anglaise peut être observée: le manoir. Celui-ci est une variante de l'encellulement des seigneuries du Moyen-Ages. L'État anglais, contrairement aux autres royaumes d'Europe, a su garder un maximum de pouvoir régalien en partie grâce aux Normands. Les seigneurs sont de fait moins forts et indépendants. Ils se construisent donc des manoirs et non des châteaux forts, plus ou moins fortifiés, et montrant leur domination au niveau local. Ceux-ci sont situés à l'extérieur des villages et peuvent être plusieurs mais dans ces cas dépendent d'un manoir principal. Le pouvoir des nobles habitant dans les manoirs est plus disciplinaire car ont un tribunal, une petite armée et des gens à leur service. Il y a donc une organisation spatiale des campagnes tout à fait singulière. Cette organisation influe sur celle des sociétés qui la peuplent. Ainsi, les populations rurales se divisaient en différentes classes. Ainsi, à la base de l'échelle sociale se trouvaient les plus pauvres, méritant ou non selon les critères des Poor Laws. Au niveau supérieur, on rencontrait les ouvriers agricoles. Au dessus encore, se distinguaient les cottagers ou ménagers et les petits tenanciers dépendants des seigneurs des manoirs. Venaient ensuite les yoemen ou paysans dit indépendants. Ils étaient en effet propriétaires de leurs terres mais restaient cependant dépendants des seigneurs en matière de sécurité. De cette classe populaire se distinguait la classe des nobles, elle-même divisée en deux catégories. La première regroupait la petite noblesse ou gentry soit l'ensemble des familles des manoirs et des gentlemen et les yoemen ayant adopté les comportements des seigneurs du fait de la loi et de leurs richesses. Le second correspondait à l'ensemble des nobles titrés ou non-titrés qui représentaient le pouvoir politique à l'échelle dans les campagnes. La société rurale anglaise était donc très hiérarchisée en fonction du rôle politique, socio-économique et de la richesse. Il faut ajouter que les passages d'une caste à l'autre étaient rares et difficiles. Les relations entre les tenanciers et les propriétaires étaient tout ce qu'il y a de plus conflictuelle. En effet, la population augmentant, le prix de la terre et de la demande haussaient au détriment d'une rente foncière qui stagnait. A cela s'ajoutaient les enclosures, ou terres privées et clôturées, que les nobles ouvraient dans le saltus pour leur propre compte dans l'illégalité totale qui réduisent la surface de terre utilisable par les paysans et amplifient la hausse des prix. Ces rapports conflictuels étaient plus ou moins forts selon le statut juridique qui organisait la rente foncière. Or quatre cas existaient. Le premier est celui des  yoemen principalement et est la situation la moins problématique. Il s'agit de celui du freehold: le tenancier paye une taxe symbolique pour le seigneur qui est fixe. Le second est un cas intermédiaire: le copyhold. Le prix est fixe car défini dans les textes médiévaux et les paysans ont le droit de vendre et de former un héritage. Le troisIème est un autre cas intermédiaire appelé leasehold ou le bail négocié: la taxe est négociée en fonction des prix du marché. L'inconvénient est qu'en situation d'inflation, la rente foncière augmente. Enfin, le dernier cas est celui le plus dur: on the rack. Le bail y est revu tous les ans, ce qui n'offre aucune possibilité de prévision.

L'organisation des espaces ruraux est donc hiérarchisé et divisé en strates pour ce qui est de l'espace en fonction des usages. Toutefois, le XVIème siècle est aussi le siècle d'une inflation qui semble perturber les paysans qui, par ailleurs, manifestent contre ce qu'ils appellent péjorativement une nouveauté.

II) Les Villes anglaises pendant l'ère élizabethaine

Dans cet État à dominante rurale, la ville apparaît comme une entité à part, se reconnaissant par le poids de ses institutions, plus complètes, et son marché. La ville anglaise reste cependant dans la continuité des villes européennes du Moyen-Ages: organisée en corporations ou guildes et dépendante de la campagne. Les villes anglaises, à l'instar de la plupart des villes européennes de l'époque, sont organisées en corporations ou guildes soit des groupes d'artisans spécialisés. Ceux-ci peuvent être des guildes de bouchers ou de tailleurs par exemple. Ces corporations organisent la vie économique et politique de la ville qui se voit être un haut lieu de commerce. Elles sont formées d'apprentis qui sont généralement des cadets des familles ayant trouvé un métier ainsi, et de leurs maîtres qui les logent et les nourrissent, faisant d'eux la catégorie de la population la plus à l'abri des crises. Ces maîtres, quant à eux, se réunissent et élisent un conseil municipal composé de oldmen qui lui-même élit un maire. Ces personnes, principalement des hommes, sont ceux ayant obtenu la liberté. Ils sont dès lors appelés freemen ou citoyens. Il faut toutefois préciser qu'ils ne composent que ¾ de la population de la ville. On compte 800 villes dans l'ensemble des îles britanniques. On observe cependant une certaine hiérarchie urbaine. Au plus bas de la hiérarchie se trouvent les Marcket Towns. Celles-ci se reconnaissent avant tout par la possession de Chartes des corporations qui leur confèrent le statut de ville. À cela s'ajoutent un marché hebdomadaire, des ateliers artisanaux et des petites institutions juridiques. Au stade supérieur se trouvent les capitales régionales soit des villes de quelques milliers d'habitants ayant une fonction plus importante que les autres. Ainsi en Angleterre, Canterburry se voit dominée par la fonction religieuse, Carliste par la fonction militaire et New Castle par la fonction portuaire, le commerce et la pêche. Enfin, en dernier lieu, on retrouve Londres la capitale politique. Ces centres, quelque soit leur rang dans la hiérarchie urbaine, restent cependant dépendants des campagnes politiquement et économiquement. En effet, comme pour les villages, les seigneurs dont le poids politique est non-négligeable malgré l'importance des corporations étant qu'ils représentent la couronne et la sécurité, vivent à l'extérieur de la ville, l'urbanisation de la noblesse ne se faisant qu'au XVIIIème siècle. En outre, les marchés et artisans n'avaient de matériaux à transformer et vendre que grâce au concours des paysans et il en était de même pour l'approvisionnement. En effet, les paysans éleveurs et agriculteurs envoyaient les cadets amener provisions et matières premières, notamment le bétail pour la viande. Cela était l'occasion pour eux de trouver un métier et de démarrer dans la vie par leurs propres moyens, les parents ne pouvant subvenir financièrement car devaient s'occuper de l'aîné, des champs et des bêtes.

Conclusion

Ainsi, villes et campagnes sont des espaces organisés en classes sociales et en activités spécialisées. La place des corporations et la dépendance des villes face à la campagne marquent cependant une certaine continuité avec l'urbanisme de l'Europe médiévale.