Chapitre 3

La révolution agricole et urbaine

Introduction

I) La paysannerie vers l'an Mil

II) La révolution agricole

III) Une conséquence de la révolution agricole: la révolution urbaine

Introduction

Au cours de l'an Mil, l'Europe connaît ce qui est qualifié par de nombreux historiens de révolution agricole. Celle-ci se caractérise par un changement considérable des conditions de travail des paysans menant progressivement à la formation de villages, puis des premières grandes villes.

I) La paysannerie vers l'an Mil

Les empires hellénistique, byzantin, romain et arabe reposaient avant l'an Mil sur la domination d'une élite militaire sur un vaste territoire. Cela permettait aux dites élites de développer de puissantes et riches villes au détriment du bien-être des paysans qui étaient le plus souvent asservis à de grandes exploitations gérées par un propriétaire lointain. L'effondrement de l'empire romain d'Occident se solde par la quasi-disparition des villes et exploitations agricoles en Europe de l'Ouest. Les soldats mérovingiens et carolingiens se partagent alors vers l'an Mil les terres et exploitent les paysans. Dans le même temps, les paysans ressortent des forêts où ils s'étaient réfugiés après la destruction des villages romains, probablement du fait d'une certaine stabilité ayant été retrouvée mais aussi d'un désir d'enterrer les morts et de stopper les incinérations contraires aux croyances de l'époque. Ils s'organisent alors en communautés villageoises, dirigées principalement par les hommes et les veuves jouant le rôle de chef de famille, les femmes célibataires restant discrètes du fait des nombreuses rumeurs sur leur compte. Concomitamment, ils forment des villages autour des cimetières et des paroisses qui se multiplient sous l'impulsion des seigneurs qui ont besoin de main d'œuvre pour leurs terres. La majorité des communautés se met ensuite en relation avec les seigneurs locaux afin d'obtenir la protection militaire et des franchises ou des droits comme celui de mariage et l'utilisation des terres et celui de défrichement ce qui implique l'élargissement des droits. À ces droits correspondent des devoirs dont celui de payer la taille, un impôt seigneurial, et la corvée, un travail en plus à faire gratuitement pour rester en paix avec les sirs, voire obtenir d'autres choses. Ces devoirs s'ajoutaient à ceux dus à l'Église et au roi, les franchises qui changent beaucoup de contenu selon les seigneuries n'étaient donc pas signe de meilleures conditions de vie pour les paysans mais plutôt celui d'une très légère amélioration.

II) La révolution agricole

A partir de l'an Mil, les seigneurs interviennent directement dans le développement économique des campagnes en investissant dans les fours et les moulins. L'Église se joint à l'effort pour le développement par le biais des moines qui encouragent aux défrichements afin de faire implanter de nouvelles abbayes et monastères. L'historienne Régine Pernoud explique dans son ouvrage Les Saints du Moyen-Age paru en 1984 aux éditions Plon que les moines ont réhabilité le travail manuel que les Romains avaient abandonné et pour lequel ils n'avaient pas hésité à organiser l'immigration de travailleurs barbares. De même, elle ajoute qu'en faisant cela les moines ont développé l'outillage de manière à alléger leur peine afin de consacrer plus de temps à la prière. La situation politique relativement calme aide largement au développement économique. Les innovations techniques se multiplient alors et se diffusent rapidement entre les villages grâce à une plus grande sécurité des campagnes, à une plus grande stabilité des communautés paysannes, à l'esprit d'initiative des abbés, et une forte croissance de la population qui, en augmentant les besoins, encourage à la recherche. Parmi ces apports techniques, l'on retrouve la charrue à roue qui facilite le labour des sols lourds au Nord de l'Europe et la technique de l'assolement triennal. Cette technique consistait à diviser la terre cultivée en trois soles: un pour le blé et les céréales d'hiver, un pour les céréales d'été et principalement l'orge et l'avoine, puis un en jachère. Elle permettait de tirer un plus grand profit des terres en alternant la jachère une année sur trois. Après l'an Mil, les moulins se multiplient et les activités textiles et métallurgiques se développent.

III) Une conséquence de la révolution agricole: la révolution urbaine

La stabilisation de la paysannerie et la multiplication des défrichements, aussi cause d'une forte déforestation, entraînent un excédent de production en céréales, notamment en blé, et en raisins, la vigne étant plus simple d'entretien. Le pain devient alors l'aliment de base des peuples en l'an Mil et le vin, un des produits les plus consommés. Il est alors possible de répondre aux besoins d'une population de plus en plus nombreuses. Se développent dès lors les premières grandes villes, dont très peu reprennent les bases des cités romaines comme Lyon. D'anciens monuments sont en ce but recyclés et réutilisés. En 1200, une centaine de villes de plus de 5 000 habitants sont construites en position de carrefour sur les grands axes de communication et parmi elles, Barcelone. Ce développement s'accélère grâce aux activités commerciales attirant les populations. Ainsi, les familles de marchands et d'entrepreneurs forment la classe bourgeoise. Elles s'associent alors en associations dans le but d'obtenir des chartes ou des actes juridiques signés entre plusieurs acteurs afin de définir des objectifs, voire des moyens communs. Grâce à ce début de capital, la bourgeoisie s'élève financièrement au dessus des paysans. De même, les évêques deviennent très vite les personnages les plus importants des villes, dirigeant le corps ecclésiastique de celles-ci. Enfin, les Grands consolident leur pouvoir en permettant le développement de ces villes sur leurs terres qui leur apportent plus d'argent et ainsi plus de moyens d'agir.

Ainsi, suite à une lente évolution politique, économique et sociale, la société féodale se met progressivement en place.