Entre 1914 et 1918 a lieu un conflit entre les grandes puissances mondiales se distinguant par sa violence et son ampleur. Pendant quatre années consécutives, les ressources économiques et les Hommes sont mobilisés pour la Grande Guerre
qui marque la fin du XIXème siècle. Pour comprendre le déroulement et les conséquences d'une telle rupture, il nous faut étudier l'engrenage politique et militaire qui se déroule entre 1870 et 1914, les raisons qui nous ont amené à considérer ce conflit comme une guerre d'un nouveau genre, puis l'état de l'Europe et du monde après 1918.
La Grande Guerre s'explique par un engrenage politique et militaire liées à des tensions entre les puissances européennes contemporaines voire antérieures au XIXème. Ces tensions donnent naissance à des alliances entre les puissances trouvant un intérêt commun entre 1882 et 1893. Elles sont aussi à l'origine de l'assassinat de l'archiduc François Ferdinand, héritier du trône de l'empire d'Autriche Hongrie, qui sert alors de prétexte à un conflit qui des Balkans s’étend à l'Europe entière.
En Europe règne au cours de la seconde moitié du XIXème siècle un climat conflictuel entre les grandes puissances que sont les empires allemand, d'Autriche-Hongrie, de Russie, ottoman, la France, et le Royaume-Uni. Ce climat trouve son explication dans les bouleversements qui ont eu lieu à partir de 1848 et qui ont engendré des tensions en 1914 sur le vieux continent. L'Europe au cours de la seconde moitié du XIXème siècle connaît d'importants changements. A partir de 1848, une vague de révolutions touche l'Europe de plein fouet notamment dans les capitales telles que Prague, Budapest, ou Varsovie. Cette période est appelée le printemps des peuples
. D'aspirations libérales et nationales, encouragés par la crise de 1847 et le mécontentement que suscitaient les gouvernements, les révolutionnaires cherchent à remettre en cause le gouvernement en place. Dans certains Etats, l'objectif est atteint: en France, les révolutions ont renversé la monarchie de Juillet qui s'appuyait principalement sur la bourgeoisie et avait privé le peuples de certains droits dont celui de grève, et ont abouti à la naissance de la Seconde République. En Italie, les Autrichiens sont chassés de Milan et de Venise et à Rome, Mazzini proclame la république. A Vienne, en Autriche, une insurrection contraint Metternich à s'enfuir et une série de révoltes menace l'unité de l'Autriche-Hongrie. En Allemagne, les libéraux élisent au suffrage universel un Parlement basé à Francfort. Mais en 1849, ces révoltes sont réprimées: les troupes piémontaises en Italie sont écrasées par les Autrichiens et une intervention française anéantit la république romaine. Le Parlement de Francfort est lui aussi défait. L'ancien ordre est donc rétabli dans certains pays. Néanmoins, ces répressions laissent de profondes cicatrices et maintiennent à vif les sentiments nationalistes des peuples dominés. L'Europe est secouée une seconde fois entre 1870 et 1871 avec l'unité de l'Italie et de l'Allemagne. L'Italie était jusque là une mosaïque d'Etats bien distincts: la Toscane, la Parme, l'Etat de l'Eglise, la Lombardie, la Vénétie, le royaume de Piémont-Sardaigne, le Trentin, l'Istrie et le royaume de Naples et la Sicile. Néanmoins, et les nationalistes comme Mazzini le disaient, ces Etats avaient en commun la langue, la religion, l'Histoire et les mœurs. Du fait de la volonté des nationalistes à unir leur pays, et du désir de Victor Emmanuel II, roi de Piémont Sardaigne, l'Etat italien le plus dynamique économiquement et industriellement parlant, le mouvement d'unification italienne, ou Risorgimento, né en 1847, se développe et enchaine victoires sur victoires, au détriment de l'Etat de l'Eglise et de quelques familles princières. La reconquête se fait de manière différente au Sud, les troupes du républicain Garibaldi, les Camise Rose, mène une campagne militaire tandis qu'au Nord, elle se fait de manière diplomatique. Le pape résiste plus longtemps grâce à l'aide de Napoléon III, arrivé au pouvoir le 10 Décembre 1848. Mais en 1870, les troupes françaises sont rappelées pour combattre la Prusse, laissant alors l'Etat du pape fragilisé. Cette même année est proclamée l'unité italienne et reste désormais au pape qu'un petit quartier de Rome considéré comme le plus petit pays du monde, le Vatican.
En 1850, l'Allemagne est fragmentée en 39 Etats, restes du Saint Empire Germanique. Des désirs d'unification se font connaître mais, bien qu'unis sur le fond, ils sont divisés sur la forme: l'Allemagne est séparée entre les partisans de la Grande Allemagne
, catholiques, voulant unir tous les peuples allemands et les autrichiens autour de l'Autriche, et les partisans de la Petite Allemagne
, protestants, souhaitant eux unir les peuples allemands autour de la Prusse. Afin de régler le conflit, la Prusse et l'Autriche rompent leur alliance et entrent en guerre. Celle-ci se solde par la bataille de Sadowa remportée par la Prusse en 1866. La marche vers la Petite Allemagne
est en route. Mais le chancelier prusse Bismarck doit encore unir des États du Sud, dont la Bavière, au Nord. Il lui faut alors trouver un ennemi commun : il choisit la France. A l'origine de ce choix, le traité de Verdun qui avait partagé l'Europe entre les héritiers de Charlemagne en 843. L’Empire allemand est proclamé le 18 Janvier 1871 à Versailles. Ces bouleversements sont directement à l'origine des tensions observables en 1914. En effet, nous pouvons remarquer que la naissance des deux nouveaux États accentue le problème des minorités dans les Balkans. A ces premières sources de conflits internes s'ajoutent les ambitions territoriales de certains États, ainsi que les rivalités de puissance et une opposition politique entre les États européens. Pour justifier l'existence de l'Empire allemand aux yeux des minorités d'Europe de l'Est, Bismark impose un nationalisme de puissance: les peuples considérés comme allemands doivent intégrer l'empire, qu'ils le souhaitent ou non. Pour les repérer, Bismark s'appuie sur des stéréotypes physiques, la langue et la culture. Cette politique est néanmoins très critiquée par des Européens de l'Ouest tel que l'historien français Fustel de Coulanges considérant que si l'Allemagne pouvait se justifier ainsi alors l'Espagne pourrait revendiquer le Portugal et la France, la Belgique. Cette idéologie s'avère donc dangereuse selon lui. Mais l'Allemagne n'est pas seule à avoir englobé bon nombre de minorités dans son empire: l'Autriche-Hongrie et l'Empire ottoman sont aussi concernés. Ces empires ont littéralement aspiré
les populations balkaniques telles que les Serbes, les Croates, les Albanais ou les Grecs, ce qui est à l'origine d'un fort nationalisme. Les Balkans représentent effectivement un sérieux avantage étant donné qu'ils offrent une ouverture sur la Mer Noire et la Méditerranée. La Pologne est, quant à elle, partagée entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et la Russie.
Mais nous pouvons aussi noter le nationalisme et les ambitions territoriales de certains États: la Russie, par exemple, souhaitait, en aidant les Serbes, étendre l'influence du peuple slave et s'offrir un accès à la mer. En Italie, l'unité n'est pas complète. Une partie est encore sous le contrôle de l'empire d'Autriche-Hongrie. Quant à la France, elle souhaite toujours reprendre les territoires perdus en 1870. Ces éléments sont autant de causes de tensions entre les États européens.
En outre, les États sont en totale opposition au niveau des régimes politiques. A la veille de la Première Guerre mondiale, l'Europe est partagée entre démocraties à l'Ouest et régimes autoritaires à l'Est, ce qui est une nouvelle source de tensions. Enfin, les empires coloniaux sont loin d'être égaux.
Si nous nous livrons à une comparaison entre l'empire colonial allemand et britannique en 1914, nous pouvons aisément voir que l'influence internationale de l'Allemagne est bien moindre que celle du Royaume-Uni, première puissance coloniale du monde au XIXème siècle, ce qui constitue là aussi une source de tensions. À savoir que le Royaume-Uni voulait se débarrasser de la puissance maritime allemande afin de rester maître des mers. L'Europe vivait donc dans un climat conflictuel à la veille de la Première Guerre mondiale.
Ces multiples tensions aboutissent à la constitution de deux blocs antagonistes. En 1882, la Triple Alliance ou Triplice est formée entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et l'Italie. Face à une éventuelle menace de leur part, la France forme avec la Russie une première alliance en 1893, puis crée avec le Royaume-Uni en 1904 la Triple Entente. Les crises marocaines opposant la France et l'Allemagne constituaient un signe avant-coureur d'une éventuelle guerre entre ces deux alliances mais, c'est la crise balkanique qui va véritablement mettre le feux aux poudres
. En 1908, la Bosnie-Herzégovine est annexée par l'Autriche-Hongrie, provoquant dès lors une montée du nationalisme des Serbes, se battant contre l'Empire ottoman depuis 1875 avec le soutien de la Russie. En 1912, la Serbie est créée. Entre 1878 et 1912 naissent aussi la Bulgarie, la Roumanie, la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro.
La crise éclate le 28 Juin 1914 avec l'assassinat de l'archiduc François Ferdinand, héritier de l'empire d'Autriche-Hongrie, peu apprécié des autres dirigeants européens, à Sarajevo par le nationaliste Serbe Gravilo Prinzip. Le 23 Juillet, l'Autriche-Hongrie adresse un ultimatum à la Serbie. Le 1er Août, tous les pays européens entrent dans un engrenage conduisant à une guerre dont on ne connaît pas encore l'issue. Le 30 Juillet, la Russie soutenant la Serbie mobilise et se prépare à la guerre. L'Allemagne, par le jeu des alliances, est alors dans l'obligation de déclarer la guerre à la Russie le 1er Août. Le lendemain, c'est au tour de la France de déclarer la guerre à l'Allemagne. Cette dernière lui déclare elle aussi la guerre et commet le premier manquement au règlement international en envahissant la Belgique, jusque là pays neutre. Le 4 Août, le Royaume-Uni déclare la guerre à l'Allemagne.
Ainsi, l'Europe passe d'une simple crise balkanique à un conflit entre Européens.
Cette guerre est un fait inédit dans l'Histoire. Entre 1915 et 1916, elle passe d'une guerre de mouvement à une guerre de position. Après 1916, le conflit véritablement au niveau mondial. Enfin, cette guerre est une guerre totale, chose que les Européens n'avaient jusqu'alors pas connu.
Dans cette guerre, deux camps s'affrontent avec, tous deux, de bons atouts. La Triple Entente maîtrise les mers, dispose de nombreuses colonies, et encerclent déjà l'ennemi de par ses positions géographiques. La Triplice a, quant à elle, une forte capacité militaire, et est déjà prête pour la guerre car l'avait souhaitée. Selon un témoignage de la romancière états-unienne Edith Wharton, dans Voyage au front, les Français, comme la plupart des peuples concernés par la guerre, ne voulaient pas la guerre mais partaient pour ce qu'ils croyaient juste. L'historien français Marc Bloch parlait de résignation patriotique
. Les armées étaient néanmoins persuadées qu'elles rentreraient pour Noël. Dès le mois d'août en France, 4 622 000 réservistes et conscrits sont envoyés sur le front. En 1914, la France subit l'attaque du plan Schiffen. Les Français, qui s'étaient postés à l'Est, n'ont pu empêcher l'attaque de l'Allemagne portée au Nord-Est. Du fait de ce problème tactique, les soldats allemands arrivent aux portes de la capitale le 2 Septembre. Entre le 6 et le 13 septembre, les armées du général français Joffre organisent une contre-offensive lors de la bataille de la Marne et cherchent à amener l'ennemi à l'Ouest où il sera encerclé par le Royaume-Uni et la France. Cette même année, la course à la mer est lancée mais aucune victoire significative n'en est ressortie. Fin 1914-début 1915, les deux armées sont face à face. Le front est immobile sur 700 kilomètres avec aucun obstacle naturel pour se protéger. On commence alors à s'enterrer dans des tranchées: la guerre de mouvement devient une guerre de position. Ce nouveau type d'affrontement entraîne d'importants changements: côté français, on opte pour l'uniforme bleu horizon, plus discret, une utilisation plus fréquente de l'artillerie, et tout particulièrement du char, ou tank, inventé pour la première fois par les Britanniques.
Les soldats, côté Triplice comme Triple Entente, découvrent les horreurs de la guerre enlisée. Les conditions de vie dans les tranchées sont extrêmes: on manque d'eau, de nouvelles de l'arrière, d'hygiène du fait des parasites et des cadavres à l'air libre. A cela s'ajoute la peur des attaques ennemies, la fatigue, et le stress, les armées ne pouvant gagner que quelques mètres de tranchées vers l'ennemi qui peut, la nuit suivante, les reprendre. Du fait de l'omniprésence de la mort, les soldats sont résignés mais espèrent que la guerre se terminera. Ces conditions obligent l'état-major à changer de stratégie: on cherche désormais à sortir de la guerre de position en provoquant l'offensive. En France, Joffre prend cette initiative et le résultat est désastreux: 350 000 morts dans les deux camps pour quatre kilomètres de gagnés et un retour aux tranchées. La Russie est de son côté presque anéantie: les problèmes linguistiques survenus au cours des batailles, la population étant en grande partie allogène*, en sont une des causes. En 1915, l'Italie abandonne la Triplice pour l'Entente qui lui avait promis de lui rendre le territoire italien occupé par l'Autriche-Hongrie et attaque l'empire autrichien sur le flanc méridional. La même année, la Bulgarie et l'Empire ottoman s'engagent du côté de la Triplice. En 1916, la France livre deux batailles inutiles et sanglantes: la bataille de Verdun et de la Somme. Verdun est une cité fortifiée française servant de repère aux armées. Les Allemands souhaitaient la prendre pour empêcher tout éventuel repli français. La bataille dure de février à décembre et se solde par une victoire française. Victoire psychologique, étant donné que l'attaque est repoussée de cinq kilomètres et aboutit à de nouvelles tranchées. La bataille de la Somme, pure diversion, qui a duré de juillet à novembre, s'est soldée, elle, par une victoire psychologique allemande. Face à ce blocage, les alliances entrent dans une guerre d'usure: on attend que l'adversaire abandonne.
A partir de 1916, la guerre s'ouvre sur de nouveaux fronts et devient véritablement mondiale: l'Entente fait appel à ses colonies, débarque dans le détroit des Dardanelles et porte le conflit en Orient. En Asie, le Japon, engagé dès le mois d'août 1914 aux côtés de l'Entente, multiplie les offensives contre les possessions allemandes en Chine et dans le Pacifique. En 1916, le Portugal et la Roumanie s'engagent du côté de l'Entente. En Europe de l'Ouest, la guerre d'usure engendre une profonde démoralisation à l'arrière comme au front. Dès avril 1917, des grèves se multiplient dans les industries d'armement et des mutineries. En Russie, la situation est dramatique. En 1914, la Russie est une grande puissance de 170 millions d'habitants, mais dont un quart est allogène et réclame un pays. En outre, l'industrialisation y est très localisée. Le tzar Nicolas II fait face, quant à lui, à deux forces d'opposition: les libéraux souhaitant un régime parlementaire et la liberté économique, et les bolcheviques*, souhaitant instaurer un régime inspiré du marxisme et dirigé par Lénine. Ce dernier est exilé car considéré comme un agitateur mais il réussit à diffuser clandestinement ses idées. Les manifestations et les mutineries font rage en Russie en cette année 1917. Le 26 février, toutes les classes sociales manifestent à Petrograd, l'actuelle Saint-Pétersbourg, en réclamant plus de démocratie et la fin de la guerre. C'est la Révolution de Février. Le 2 mars, le tzar abdique et est fusillé en avril avec sa famille. Se met alors en place un gouvernement provisoire. Dirigé principalement par les libéraux, il devient très vite impopulaire du fait qu'il continue la guerre. Lénine, qui a réussi à revenir en Russie, décrète alors qu'une seconde révolution est nécessaire. En octobre 1917, c'est chose faite: les bolcheviques arrivent au pouvoir et entament immédiatement des négociations avec l'Allemagne. Elles aboutissent à la signature du traité de Brest-Litovsk qui permet à la Russie de rapatrier ses troupes et d’arrêter la guerre. Ce retirement est vite compensé par l'entrée en guerre des Etats-Unis le 2 septembre 1917. Traditionnellement isolationniste, le pays avait choisit la neutralité en 1914, mais a été contraint de s'engager du fait de la menace de la guerre sous-marine lancée par les Allemands.
L'effort de guerre nécessite des besoins bien spécifiques. Il fallait ravitailler le front en armes et en nourriture afin que les soldats puissent survivre aux tranchées, à la vermine, à la faim et puissent faire face à l'ennemi. L'on devait aussi financer la guerre. L'argent était nécessaire pour favoriser la recherche, produire les armes et engins de guerre, et offrir un salaire aux ouvriers, scientifiques et soldats. Enfin, il fallait mobiliser l'arrière et les esprits afin d'avoir de une main d'œuvre qui, a priori, ne devait pas se rebeller. Pour se faire, les gouvernements pratiquaient ce que nous appelons aujourd'hui l'interventionnisme. Ils réquisitionnaient les entreprises pour l'effort de guerre. Nous pouvons citer à titre d'exemple l'Allemagne qui, après avoir envahi la Belgique s'est dépêchée de réquisitionner les fabriques belges aux fins de réparations de locomotives et d’automobiles, ainsi qu’en vue de la production pour le front
. L'objectif était aussi de dégorger l’industrie allemande et d’économiser les transports
soit de minimiser les dépenses de l’Allemagne. Ils faisaient des emprunts, ce fut notamment le cas entre l'Entente et les Etats-Unis, et contrôlaient les prix en gérant le commerce extérieur, le taux de change, les répartitions de matières premières, et encourageaient parfois les populations, déjà forcées de cultiver pour l'armée, de ne pas acheter de produits bon marché, voire de moins manger. En outre, ils usaient largement de la propagande et empêchaient les soldats blessés de revenir à l'arrière afin que l'arrière ne s'inquiète pas de ce qui se passait au front et ne se rebelle pas. Nous pouvons voir ce bourrage de crâne
à travers des phrases telle que plus les armes se perfectionnent, plus le nombre de morts et de blessés diminue, parue dans Le Temps, le 4 Août 1914. Enfin, ce type de fonctionnement, appelé économie de guerre, s'est soldé par une véritable guerre économique disposant d’une forte puissance maritime, la Triple Entente met en état de blocus les empires centraux en 1915. L’Allemagne riposte alors par une guerre sous-marine. De nombreuses batailles se déroulent alors sous les eaux entre 1915 et 1917, notamment près de la côte atlantique de l’Europe, et de l’Afrique du Nord. La plus célèbre restant celle du Jutland en Mer du Nord, qui opposa la Royal Navy et la Kaiserliche Marine en 1916. Malgré tout, aucune de ces batailles n’a permis aux alliances de prendre le dessus sur l’une ou l’autre. Ainsi, la Première Guerre mondiale s'est non seulement distinguée par la guerre de position, mais aussi par le fait que ce soit une guerre totale.
La guerre 14-18 se singularise aussi par sa violence. Le combat devient un sacrifice, une abnégation. La haine de l'autre est telle que certains soldats en arrivent à prendre plaisir à tuer. Lors des affrontements, les codes d'honneur sont oubliés: des soldats tirent sur des ambulanciers, des infirmiers, agressent des civils, violent, pillent des villages. Enfin, nous connaissons au cours de cette guerre le premier génocide* du XXème siècle. Entre 1915 et 1916, l'empire ottoman extermine littéralement les Arméniens. Environ 1,2 million d'Arméniens sont victimes de ce massacre organisé. Dans chaque province de l'empire ottoman, les autorités ont fabriqué des preuves d'un complot arménien permettant la Russie d'attaquer l'empire de l'intérieur, et cela pour justifier la déportation de civils et leur élimination.
La Première Guerre mondiale est donc passée d'une guerre de mouvements à une guerre d'un nouveau genre.
Après la guerre, la recherche d'une paix mondiale se met en route. Pour comprendre quel est cet idéal, il nous faut étudier les conditions dans lesquelles le conflit s'est terminé, les conséquences qu'il a engendrées et la formation de la Société des nations.
L'année 1918 marque la fin du conflit le plus meurtrier connu jusqu'alors. Cette année paraissait au départ plutôt avantageuse pour l'Allemagne: avec le traité de Brest-Litovsk, elle avait pu renforcer ses effectifs à l'Ouest. Les chefs du haut commandement, Hindenburg et Ludendorff, avaient d'ailleurs lancé de prometteuses attaques en Picardie, en Flandre et en Champagne. Mais, les forces de l'Entente avaient été, dès 1917, gouvernées par des hommes déterminés: Lloyd George pour le Royaume-Uni, Georges Clémenceau pour la France, ou Orlando pour l'Italie. Clémenceau gouvernait seul et se rendait souvent au front pour calmer l'ardeur des troupes. Quant à Orlando, il avait emprisonné les leaders socialistes pour éviter que le pacifisme n'atteigne l'Italie. En outre, l'Entente avait l'appui des Etats-Unis et la lassitude avait gagné les troupes allemandes. Le 8 août 1918, la contre-offensive de l'Entente, commandée par Foch, ne trouve aucune résistance. Bon nombre d'Allemands se rendent sans combattre. En septembre de la même année, le haut commandement allemand fait connaître sa décision d'arrêter les hostilités. Le chancelier allemand Max de Bade entame alors des négociations avec le président états-unien Wilson, qui avait proposé ses Quatorze Points aux membres de l'Entente pour maintenir la paix après la guerre. Wilson y avait exprimé le souhait que les peuples libérés des empires pourraient disposer d'eux-mêmes
. Pendant ce temps, le conflit s'élargit: de Palestine, l'Entente attaque la Turquie et de Grèce, elle lance une offensive contre la Bulgarie. En octobre, l'Italie perce le front autrichien à Vittorio Venetto. L'Autriche-Hongrie capitule le 3 novembre et laisse l'Allemagne isolée. Le même jour, des mutineries éclatent, côté allemand, dans le port de Kiel, alors qu'un climat insurrectionnel se développe dans tout le pays. Afin d'éviter la révolution, l'empereur Guillaume II abdique le 9 novembre. Le 11 novembre, l'armistice est signé à Rethondes, dans la forêt de Compiègne, avec les représentants de la nouvelle république allemande.
La Première Guerre mondiale laisse un bilan désastreux: 8 millions de morts et 6 millions d'invalides pour l'Europe. L'on construit en l'honneur des soldats des monuments aux morts, ce qui témoigne de l'ampleur du traumatisme. La guerre a ébranlé les pensées: bon nombre d'artistes témoignent des atrocités de la guerre et certains penseurs prophétisent la fin de l'Occident. En outre, les zones ayant servi de théâtres aux opérations militaires sont totalement dévastées, notamment le Nord et l'Est de la France, la Belgique, les Pays-Bas, le Nord-Est de l'Italie, la Serbie et la Russie. Ponts, usines, routes et maisons ont été détruits lors des combats. Quant aux anciennes zones agricoles, les bombardements les ont rendues incultivables. Enfin, l'Europe subit des bouleversements géopolitiques importants: les empires ont laissé place à de nouveaux états avec lesquels il va falloir cohabiter. Enfin, la IIIème Internationale communiste est créée en Russie en mars 1919, dans le but d'exporter la révolution. De nombreux foyers révolutionnaires se forment en Europe. Ceux-ci sont réprimés dans le sang en Allemagne et en Hongrie. En Italie, le fascisme gagne du terrain.
La conférence de la paix qui fait suite à la victoire de l'Entente a lieu en janvier 1919 à Versailles et rassemble 27 nations. Il s'agit non seulement de sanctionner les vaincus, considérés comme les seuls responsables de la guerre, mais aussi de garantir la paix mondiale et la sécurité pour les générations futures. Pour ce faire devait-être créée une organisation internationale: on décide de fonder la Société des Nations ou SDN. La conférence est rapidement dominée par le conseil des Quatre, constitué par les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, et l'Italie, représentés respectivement par Wilson, Clémenceau, Lloyd George et Orlando. L'Allemagne et les pays vaincus sont exclus des négociations. L'URSS naissante est elle aussi absente. Les principes qui devaient être à la base de l'idéologie de la SDN sont en grande inspirés par les Quatorze Points de Wilson qui préconisaient notamment le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, l'abandon de la diplomatie secrète, la liberté des mers, le désarmement et l'établissement d'une charte des droits et des devoirs internationaux par le biais de la création d'un organisme international. Mais l'application de ces idéaux wilsoniens s'avère vite impossible. En effet, sur le long terme, la SDN est de plus en plus considérée comme un échec par les populations devant subir ses défauts. La première critique concerne l'absence de force militaire qui lui soit propre. La SDN doit compter sur les armées françaises et britanniques pour prétendre être doter d'un corps armée, les Etats-Unis ayant refusé d'entrer dans l'organisation le 19 novembre 1919. En outre, la SDN ne représentait pas toutes les nations: le Japon, au départ membre permanent du Conseil, se retire en 1933, après que la SDN ait refusé la conquête de la Manchourie. Cette même année, l'Allemagne, admise en 1926, quitte l'organisation sous l'impulsion d'Adolf Hitler. Elle est suivie par l'Italie en 1937. L'URSS, membre de la SDN à partir de 1934, est exclue le 14 décembre 1939, pour avoir agressé la Finlande. Cette Guerre d'Hiver devait permettre à l'Etat soviétique d'envahir l'Etat finlandais, refusant toutes négociations, afin de créer un avant poste protégeant Leningrad, très proche de la frontière, et contrer une éventuelle agression de l'Allemagne nazie. Enfin, la SDN n'osait appliquer de sanctions du fait que les Etats membres protégeaient avant tout leurs intérêts et que les décisions devaient être votées et acceptées à l'unanimité pour qu'elle puisse être mise en vigueur.
Ainsi se met en place à la fin de la guerre, une organisation internationale souhaitant garantir la paix mondiale mais dont les défauts, alliés aux bouleversements géographiques et politiques, annoncent déjà une Seconde Guerre mondiale.
Pour conclure, nous pouvons dire que la Première Guerre mondiale a été la conséquence d'un engrenage politique qui s'est déroulé entre 1870 et 1914, qui laissa place à une guerre d'un nouveau genre, ayant elle-même engendré la naissance de la SDN et d'importants bouleversements en Europe, et que ces derniers constituent des signes avant-coureurs de la Seconde Guerre mondiale.