Dans les années 1980, Jean-Pierre Poly et Eric Bournazel mènent une recherche concernant ce qui est appelé la Révolution de l'an Mil
. Ce phénomène consisterait en une rupture historique qui aurait marqué la naissance de la civilisation occidentale par une suite de mutations notamment politiques, économiques, sociales, et religieuses. La thèse reste toutefois bancale et est à ce titre l'objet de nombreux débats. En effet, l'an Mil, que l'historien Georges Duby appelle le printemps du monde
, correspond à une période du calendrier chrétien, propre à l'Occident et à l'Europe, et exclue de fait les autres espaces de la planète non concernés par cette révolution
que les historiens délimitent entre le Xème et XIème siècle.
De la même manière, un problème subsiste quant à ces limites géographiques: l'Europe et l'Occident sont des espaces nés de conventions, d'accords et n'ont de fait aucune réalité physique à proprement parler. Ainsi, si l'on fait s'arrêter le continent européen à l'Oural dans sa partie Est, peut-on pour autant placer la Grèce de l'Empire Romain d'Orient
dans ce continent dont la partie Ouest a gardé la dénomination d'Occident
? De même, l'usage du terme révolution est largement discutable: doit-on parler d'une seule révolution ou de plusieurs dans le cas de l'an Mil? Il faut aussi se demander s'il y a eu des évolutions structurelles au cours de l'an Mil en Europe et, si oui, si le qualificatif de révolution, qui désigne généralement une rupture profonde, irréversible et rapide, est approprié. Pour le savoir, cette étude sera consacrée dans un premier temps aux changements politiques, économiques et sociaux, puis dans un second temps aux changements culturels et religieux ainsi qu'à la naissance d'un modèle occidental. Enfin, il faudra déterminer si l'analyse permet de voir une ou plusieurs révolutions ou une période de lentes évolutions.