Chapitre I

Qu’est-ce que l’économie de guerre ?

Introduction

I) L’effort de guerre

II) L’interventionnisme

III) Les problèmes de l’économie de guerre

Conclusion

Introduction

En 1914 est engagé pour des causes territoriales, coloniales, politiques, économiques et diplomatiques, le premier conflit mondial dans l’histoire de l’humanité. Cette Première Guerre mondiale, qui dura jusqu’en 1918 et marqua le début du XXème siècle, est caractérisée non seulement par son impact international, mais aussi par un nouveau type d’économie : l’économie de guerre. Qu’est-ce que l’économie de guerre ? Pour le savoir, nous verrons que cette économie correspond à un besoin permettant de continuer l’effort de guerre, et qu’elle se traduit par un fort interventionnisme. Nous étudierons enfin, dans la troisième partie de notre réflexion, les inconvénients de ce type d’économie.

I) L’effort de guerre

L’économie permet de continuer ce que nous appelons l’effort de guerre, soit le fait de tout mettre en œuvre pour vaincre son adversaire, en subvenant à un besoin. Celui-ci est triple : il faut assurer le ravitaillement du front, financer la guerre, et mobiliser la main d’œuvre et les esprits.

A) Assurer le ravitaillement du front

Le ravitaillement des troupes sur le front en armes et en nourriture est en effet vital, non seulement pour les Hommes, mais aussi pour la défense du pays. Dans les tranchées, il faut que les soldats puissent survivre aux conditions extrêmes, au froid et à la vermine, ainsi qu’aux attaques de l’ennemi. Ainsi, différentes entreprises étaient menées pour fabriquer les armes. Les scientifiques et des usines tout entières fabriquaient des moyens de transports et des armes d’offensives tel que l’entreprise française Renault qui, en 1918, avait fabriqué environ 750 chars d’assaut et un total de 2 000 000 d’obus. De même, la France avait augmenté la quantité annuelle de charbon produite de 500 millions de tonnes entre 1915 et 1917, et de fer de 35 millions de tonnes pour dynamiser ses usines d’armement dans l’optique d’offensives à l’encontre de la Triplice. Quant à la nourriture, des soldats étaient chargés de s’occuper du ravitaillement culinaire des troupes.

B) Financer la guerre

Financer la guerre est une des priorités des pays en conflit. L’argent permet de construire les armes, d’offrir un salaire aux ouvriers, aux scientifiques, et aux soldats travaillant à l’effort de guerre. Conscient de cette nécessité, les Etats-Unis, qui étaient entrés en guerre du côté de la Triple Entente, publièrent en Avril 1918, une affiche où ils incitaient les Etats de l’Entente à leur faire un troisième emprunt pour financer leurs industries et l’effort de guerre. Le slogan pose d’emblée l’image que veut se donner le pays dans le but de convaincre l’Entente à dépenser : « Pour faire du monde un endroit acceptable où vivre » ; « Participez - Achetez des bons du gouvernement américain » ; « Troisième emprunt pour la liberté ». C’est un Etat prétendant se battre pour la paix dans le monde qui apparaît à travers ces quelques mots.

C) Mobiliser la main d’œuvre et les esprits

La guerre nécessite non seulement des armées performantes, mais aussi un arrière qui puisse subvenir aux besoins du front en permanence. Il faut alors mobiliser la main d’œuvre et les esprits. La main d’œuvre doit permettre la fabrication des armes nécessaires, voire les inventer grâce à l’aide des scientifiques, comme ce fut le cas pour le lance-flamme en Allemagne. Enfin, il est nécessaire qu’elle reste consentante pour qu’aucune mutinerie ne se déroule. Pour cela, le gouvernement français, comme les autres Etats engagés dans ce conflit, mobilise les scientifiques, les ouvriers, les colonies, les vieillards et les enfants en mesure de travailler. La part des femmes dans les effectifs des usines Renault atteint 31,6% en 1918. En référence à cette stratégie a d’ailleurs été publiée dans un journal satirique une illustration intitulée La Baïonnette, représentant une femme en train d’admirer l’obus qu’elle vient de construire. L’Etat français déclare aussi, toujours dans cet objectif, le 31 Juillet 1914, l’Union Sacrée entre tous les partis politiques pour que chaque Français, quelque soit son idéologie politique, contribue à l’effort de guerre. De même décide-t-il l’encadrement de l’arrière par la censure, la propagande et l’interdiction du retour des soldats avant la fin de la guerre afin que les civils ne se rebellent pas contre une guerre menaçant l’intégrité du pays.

Ainsi, pour qu’une guerre soit menée il faut que le pays belligérant puisse la financer, ravitailler les troupes au front, et que sa population consente à participer à l’effort de guerre.

II) L’interventionnisme

L’exemple de la France cité auparavant, qui peut être généralisé aux autres Etats ayant participé au conflit, nous laisse percevoir une stratégie qui sera plus tard utilisée par le président Etats-unien Roosevelt dans sa politique du New Deal pour sortir son pays de la crise des années 1930 : l’interventionnisme. Pendant la Première Guerre mondiale, celui-ci s’est traduit par des réquisitions de masse, des emprunts pour certains pays et un fort contrôle des prix, puis par une guerre économique.

A) Réquisitions

Le système utilisé par Roosevelt lors du New Deal se retrouve en 14-18, bien que n’ayant pas le même objectif. En effet, comme nous l’a montré l’exemple de la France, les réquisitions d’entreprises et les mobilisations ont été nombreuses au cours de la Première Guerre mondiale. Lorsque l’Allemagne eut envahi la Belgique en 1917, elle se dépêcha de réquisitionner les « fabriques belges aux fins de réparations de locomotives et d’automobiles, ainsi qu’en vue de la production pour le front ». Le but est aussi de « dégorger l’industrie allemande et d’économiser les transports » soit de minimiser les dépenses de l’Allemagne. Ce fait, paru dans un article du journal Le Nord. Allgemeine Zeitung le 18 décembre 1917, nous montre bien cette importance.

B) Emprunts et contrôle des prix

Beaucoup d’emprunts ont aussi été effectué, et tout particulièrement aux Etats-Unis. De la même manière, la propagande était mobilisée afin de récolter des fonds. Celle-ci était chargée de convaincre la population de participer aux emprunts faits par le gouvernement. Ainsi, une affiche a pu être placardée en ce but sur les murs des villes françaises afin de convaincre la population de participer à un second emprunt national. L’interventionnisme s’est enfin caractérisé par un fort contrôle des prix. L’Etat contrôle, en effet, le commerce extérieur, le taux de change, et la répartition des matières premières afin que toutes les richesses du pays participent à l’effort de guerre. La population est de même obligée de cultiver chez elle. On conseille de prendre des produits bon marché, voire de moins manger. Le but est d’économiser et d’emprunter afin de financer la guerre.

C) Guerre économique

L’économie de guerre organisée par la méthode de l’interventionnisme s’est aussi soldée par une guerre économique. Disposant d’une forte puissance maritime, la Triple Entente met en état de blocus les empires centraux en 1915. L’Allemagne riposte alors par une guerre sous-marine. De nombreuses batailles se déroulent alors sous les eaux entre 1915 et 1917, notamment près de la côte atlantique de l’Europe, et de l’Afrique du Nord. La plus célèbre restant celle du Jutland en Mer du Nord, qui opposa la Royal Navy et la Kaiserliche Marine en 1916. Malgré tout, aucune de ces batailles n’a permis aux alliances de prendre le dessus sur l’une ou l’autre.

Ainsi, l’économie de guerre consiste en une modification des structures économiques afin de tout mettre en œuvre pour prendre le dessus sur l’adversaire qui se traduit par un fort inteventionnisme de l’Etat.

III) Les problèmes de l’économie de guerre

L’économie de guerre est désormais définie par son aspect technique, mais elle présente des conséquences humaines qu’il ne faut en aucun cas minimiser. Elle pose effectivement un problème éthique sur la place de l’Homme dans ce type de système économique, et un problème politique car il faut, après la guerre, repasser à une économie « standard ».

A) La place de l’Homme dans l’économie de guerre

L’économie de guerre pose néanmoins un problème moral et humain. L’être humain n’est plus qu’un simple pion des gouvernements belligérants, servant une guerre qui parfois lui échappe. Ce fut notamment le cas pour les soldats issus des colonies qui vont alors découvrir les inégalités entre la France métropolitaine et leurs pays d’origine, ainsi que la faiblesse d’un Etat qui aura asservi son peuple. Ainsi, suite à la guerre, les colonies, surtout britanniques et françaises comme l’Inde et l’Algérie, se sont mises à réclamer plus de reconnaissance pour les pertes dues à une guerre qui leur était étrangère, voire l’autonomie. Ce sentiment de révolte se remarque aussi chez les anciens poilus. L’un d’eux, Léon Weil, déclarera en 2005 dans Le Parisien : « La guerre ne sert qu'à faire mourir les hommes et enrichir les marchands de canons ».

B) Repasser à une économie « standard »

Repasser à une économie « standard » est la principale difficulté après une guerre. La Première Guerre mondiale a été particulièrement meurtrière. En France, on compte environ 1,4 millions de morts, civils et soldats compris, dont près de 70 000 indigènes, ainsi qu’un million d’invalides. En tout, ce sont près de 9 millions de soldats qui ont perdu la vie dans cette guerre que la population espère, à tort, la « der des der ». De même, les infrastructures et les villages sont endommagés voire entièrement détruits. C’est notamment le cas de Verdun, Reims, et Ypres qui sont pour ainsi dire entièrement dévastés. Il faut alors reconstruire.

Conclusion

Nous pouvons donc en conclure que l’économie de guerre est une modification des infrastructures économiques afin de les mettre toutes entières au service de l’effort de guerre, se traduisant par un fort interventionnisme du gouvernement. Mais ce type d’économie pose un problème politique pour ce qui est du retour à une économie standard, puis éthique et humain pour ce qui est de la place de l’Homme dans ce système économique. L’Etat peut-il se permettre de manipuler la population pour mener une guerre qu’elle ne comprendra pas forcément ? Et, si oui, pendant combien de temps ? Enfin, la politique du New Deal nous a montré que l’interventionnisme peut servir à autre chose que la guerre. Nous pouvons donc aussi nous demander si certains aspects de l’économie de guerre ne peuvent pas permettre d’aider un pays en cas de crise.

Sources

  • Histoire 1erL-ES-S et 1er L-ES-S Géographie L'Europe, la France,édition Hatier, 2007
  • Mémobac Histoire Géographie édition Bordas